« Ni leur chair ni leur sang n’atteindront  Dieu,

mais ce qui L’atteint de votre part c’est la piété »

 (Coran 22/37)

Le  sacrifice d’Abraham est un rappel que  Dieu, seulement  Lui, mérite  notre adoration. Non parce qu’Il en a besoin, mais parce qu’une  telle piété fait de nous des êtres de bonté  envers Sa  création.  Si s’approcher de Dieu est le sens  du « qurbani », cela n’est possible que dans le respect  de l’animal  et son  partage  avec nos proches et les nécessiteux.

Nous sommes le jour de la  Eid-ul-Adha,  le  lundi 10 Dhul Hijjah  1437 , soit  le 12 septembre 2016.  Durant le week-end, plusieurs  centaines d’animaux ont été acheminés aux quatre coins de l’ile. Tous ont été trouvés en bonne santé par le corps vétérinaire. Ils ne montrent aucun signe de fièvre aphteuse, sinon ils ne pourront être sacrifiés selon le droit  islamique. Risquent-ils de contacter le virus durant le trajet des fermes, parcs et écuries jusqu’aux  points d’abattage dont nombreux se situent dans des zones affectées ?  Sont-ils porteurs du virus mais la maladie ne s’est pas encore manifestée ? Sont-ils à l’abri de toute contamination sur le lieu d’abattage, les uns plus insolites que les autres ? Comment  aussi y contrôler l’accès des personnes concernées et  des curieux ?  Comment s’assurer qu’il n’y a pas d’animaux aux alentours, y compris l’inévitable  chien errant qui rode ?

Imaginons quand même que  l’abattage se fasse dans des conditions idéales partout, à commencer par une façon digne  de traiter les animaux comme l’exige   les préceptes islamiques.  Et que les règles d’hygiène sont scrupuleusement observées allant de la désinfection  des lieux, outils  et véhicules à  l’évacuation de l’eau de lavage à coup de détergents.  Osons  penser que les carcasses, les viscères et les peaux sont soigneusement ramassées dans de grands sacs hermétiques.  Espérons que les collectivités locales s’en chargent selon les  normes de biosécurité requises. Soyons  optimistes et disons que tout se passe bien jusqu’ici.

Or, c’est n’est  qu’après le sacrifice que se pose la pire difficulté. Dans les foyers musulmans du pays arrivent et partent  de petits sacs en plastique contenant un ou plusieurs morceaux de viande destinés aux proches ou aux pauvres. En à peine une journée, la viande encore crue  d’un  animal peut se retrouver  dans presque tous les coins du pays. Et les petits sacs  finissent dans des poubelles sans aucun tri, sinon tout simplement dans la nature. Quant à la viande ainsi partagée, si elle  n’est pas entièrement cuite  immédiatement, elle  risque d’être en contact avec d’autres vecteurs. À ce niveau, la surveillance est  très difficile.

Le danger est exclu si l’animal ne porte pas le virus responsable de la fièvre aphteuse. Nous parlons bien de la santé  de  l’animal, et  des animaux en général qui sont susceptibles d’attraper ce virus et d’en mourir.  Car même si l’animal  ainsi infecté n’est pas acceptable pour le « qurbani » spécifiquement, sa chair peut être  comestible.  Toute notre vigilance est donc motivée par notre intention de sauver des animaux  d’une épidémie, y compris les porcs dont la consommation ne concerne pas les musulmans.  Certains  y ajoutent une dimension économique, mais si nous en faisons une priorité, nous nous éloignons d’une éthique à laquelle nous invite précisément le sacrifice d’Abraham. L’animal est une créature de Dieu et ainsi mérite notre respect. Nous ne pouvons lui enlever la vie, qu’avec Sa permission, que dans le but de nous nourrir. D’ailleurs,  l’enseignement du Prophète (saw) stipulant  «Quand vous apprenez que l'épidémie est dans un pays, n'y allez pas et, si l'épidémie arrive quand vous y êtes déjà, n'en sortez pas» ne s’appliquerait-il pas aussi aux animaux à qui nous devons une protection digne ?

 

Conclusion

Le « qurbani » requiert un animal en bonne santé, faire  don de ce que nous avons de meilleur. Le principe de la quarantaine est  islamique de source. Déplacer un animal ou de la viande susceptible de porter le virus comporte trop de risques. Sauvegarder les animaux d’une épidémie est  une obligation. La surveillance en matière de biosécurité pose d’épineux  problèmes, un sérieux défi dans le contexte actuel.  Face à cette situation, c’est aux autorités  d’assumer leurs responsabilités. Les savants musulmans ne pourront que confirmer que les alternatives ne manquent pas. La fête se fera, in sha Allah…